Rencontre avec une coach




- Quel a été votre parcours ?
-  Je suis coach depuis sept ans. A la base j’étais dans les affaires, et intéressée par l’humain donc j’ai accompagné les gens. J’ai été à la chambre de commerce pendant plus de dix ans, où j’ai été directrice d’observatoire économique, j’ai travaillé dans différentes entreprises, ai fait de la vente, ai fait du conseil d’entreprise. Il y a treize ans, j’ai eu de gros problèmes personnels. C’est souvent ce qui se passe quand on décide de changer de vie. En gardant ce que j’avais avait appris au niveau des affaires, j’ai changé de métier et ça m’a permis de mettre plus de sens dans ma vie. Je me suis rapprochée des techniques plus “new age”, et ai développé des techniques spécifiques. Au début je faisais des conférences, par exemple “j’ai décidé d’être heureux”. Après avoir assisté à la conférence, les gens avaient envie de travailler avec moi.
-  Quelles études avez-vous suivies ?
-  Je suis diplômée de Weller à Paris, qui est une école supérieure de commerce, ainsi que du Californian International Institute of Business, qui se situe à San Francisco et est une école de marketing. J’ai également un diplôme universitaire de musicien intervenant, ça me permet de comprendre les métiers artistiques. J’ai plutôt été dans les affaires, et j’ai fait des formations continues dans le domaine des ressources humaines : TCC : techniques comportementales et cognitives (exemple : analyse systémique, analyse transactionnelle, et Process communication, crée par Taibi Kahler).
-  Que pensez-vous de la réglementation de ce nouveau métier ?
-   Il y a pleins d’instituts et écoles de coaching qui fleurissent. C’est un métier très jeune et pas réglementé. Même chez les psychothérapeutes où c’est assez libre, il y a quand même un minimum de codes de travail. N’importe qui peut être coach. Tous ceux qui sont intéressés par la psychothérapie, ceux qui ont envie d’aider les autres peuvent se diriger vers le métier du coaching.
-  Qu’est-ce-qui amène les gens à devenir coach ?
-  Les conditions de travail. Il y a vingt ans on disait aux plus de 45 ans qu’ils étaient trop vieux, maintenant on dit aux moins de 30 ans qu’ils sont trop jeunes. Les salariés sont quand même assez malmenés : de plus en plus de travail, de moins en moins de budget. A un moment les gens n’en peuvent plus et essayent de trouver une porte de sortie. Ils essayent de trouver des métiers qui ont du sens, et pourquoi pas le coaching.
-  Comment savoir si on a trouvé un bon coach ?
-   Pour savoir si quelqu’un est un bon coach ou non, on va le voir quelques fois, et ça coûte cher, alors si il n’y a pas de résultats on change de coach. Les psychiatres sont gratuits. Il y a beaucoup de personnes qui deviennent coach, et au bout de quelques mois n’arrivent pas à en vivre, alors ils repartent. Il y a quand même des règles et des responsabilités dans l’accompagnement des personnes.
-  Décrivez-nous le métier de coach.
-   Le coaching est une profession libérale : on doit être indépendant et à son compte, ce n’est pas simple ; il faut générer pas mal d’argent pour en gagner à la fin du mois. Ce n’est pas parce qu’on a gagné 1000 Euros à la fin du mois qu’il y 1000 Euros dans votre poche. Ce n’est pas évident, il y a beaucoup de choses à connaître.
-  Quoi donc par exemple ?
-  Il faut être malin pour arriver à se faire connaître. On peut avoir une carte de visite où il y a marqué “coach”, si on n’a aucun client on ne l’est pas.
-  Connaissez-vous des “nouveaux coachs” ?
-  Oui, il y a régulièrement des gens qui me posent des questions pour avoir des conseils afin de devenir coach.
-  Les orientez-vous alors sur une école de coaching ?
-  Je ne connais pas les écoles de coaching, je ne peux pas dire s’il y en a une qui est mieux que d’autres. Les écoles de coaching font beaucoup de publicité pour dire que sans elles on ne peut rien faire.
-  Quelles sont vos méthodes ?
-  J’ai développé des méthodes particulières, et utilise aussi des méthodes plus traditionnelles comme la Gestalt Thérapie. Je les enseigne en ce moment à un coach à Nice qui s’appelle Gilles Chollet.
-  De quelles professions sont issus vos clients ?
-  Je coache des tas de gens, et aussi des professions libérales, par exemple des avocats, architectes, journalistes, etc. Mon but est qu’ils gagnent leur vie. Environ un tiers de ces professions libérales que je coache sont dans l’accompagnement personnel : médecins, thérapeutes, psychologues, et aussi des coachs. Je leur apprends que, en tant que coach, médecin, ou psychologue il faut aller bien, gérer leur énergie, gérer la distance avec le patient. Dans un métier on passe son temps à se remettre à jour, surtout dans une économie qui évolue beaucoup, à réapprendre, et ce n’est pas particulier au coaching.
-  Depuis quand avez-vous adopté le titre de coach ?
-  Le terme de “coach”, je l’ai pris il y a trois ou quatre ans, pas avant. Quand j’ai démarré, je n’avais pas de titre professionnel sur ma carte de visite. A un moment donné je me rendue compte que les gens avaient besoin d’un titre. Le titre le plus proche de ce que je faisais c’était “coach de vie”. Je sais que je suis à ma place dans ce métier, vu que je gagne ma vie.
-  Quelle attitude adoptez-vous avec vos clients ?
-  Quand quelqu’un vient me voir, il sent que je ne le force pas à rester. Je lui dis tout de suite “Soyez très à l’aise, pour que ça fonctionne il faut que vous soyez à l’aise avec moi ; si vous ne l’êtes pas, soyez tranquille, allez voir quelqu’un d’autre”. Il faut que le courant passe, c’est très important.
-  Pourquoi les gens viennent-ils vous voir plutôt qu’un psychologue ?
-  Les gens viennent me voir comme une alternative aux psychologues, psychothérapeutes, psychiatres. Quand on va mal, en particulier en Alsace -Strasbourg est la ville la plus psychanalysée de France-, on a tendance à aller voir un psychiatre, parce que c’est remboursé. Moi je pense qu’un psychiatre c’est pour les vraies pathologies.
-  Comment faites-vous pour les personnes à pathologies ?
-  Lorsque j’ai des personnes à pathologies, je préfère travailler avec les médecins, car c’est délicat. J’ai un client qui était suivi depuis deux ans par un médecin et toute une équipe, dont certaines personnes lui ont conseillé de venir me voir. En deux mois il a complètement changé. Ceux qui viennent chez moi pour une souffrance seraient mieux chez un psychologue, ou psychothérapeute. Un psychiatre c’est médecin. Le but d’un psychiatre ou d’un psychologue, ce n’est pas forcément que vous soyez heureux. Leur but c’est de comprendre pourquoi vous avez des difficultés. Un coach va plutôt vous amener à trouver comment vous allez faire pour aller bien aujourd’hui, peu importe ce qui s’est passé avant. Ce que font les psychologues est différent.
-  Qu’entendez-vous par différent ?
-   Moi je vais avoir une démarche plus active. Pour une grande partie des psys, il est interdit d’être actif, parce que c’est contraire à ce qu’on leur a appris. Le but c'est que la personne trouve d’elle-même ce qui ne va pas bien, il faut éventuellement quelque chose de neutre pour les aider. Les psys ont des techniques dites comportementales et  cognitives qu’ils ont approfondi beaucoup plus que moi, comme l’analyse transactionnelle, la PNL, etc. Je connais la PNL, mais je n’aime pas donc je n’utilise pas cet outil. Tous ces outils sont de très bons outils, et c’est avec eux que les psys vont aider la personne à comprendre ce qui se passe, et pourquoi. Les gens choisissent selon ce qui leur convient le mieux entre le coaching et la thérapie. Je récupère souvent des gens qui ont été chez des thérapeutes.
-  Pourquoi viennent-ils chez vous ?
-  Une partie vient chez moi parce qu’ils trouvent que le système de coach, c’est bien, ils savent ce que c’est, ils veulent essayer. Et d’autres qui ont déjà fait des démarches, comme la psychothérapie, vont venir chez moi, car ils ont “restés sur leur faim”. En plus de comprendre pourquoi ils vont mal, ils veulent régler le problème. Pour eux c’est une alternative. Ceux-là vont dire que le coaching c’est mieux, parce que si ils sont venus chez moi, c’est qu’avant ils n’étaient pas satisfaits.
-  Adaptez-vous vos méthodes aux différentes personnes que vous rencontrez ?
-  Oui. Pour les entretiens, je fais beaucoup de sur-mesure. Je peux trouver cinq personnes différentes pour qui je n’utiliserai pas les mêmes outils. Je procède de la manière suivante. Tout d’abord j’effectue un pré-entretien au téléphone où je pose quelques questions pour se faire une idée de ce que la personne veut. Ensuite j’accueille les personnes toutes seules pour faire connaissance, et je regarde si j’ai les outils pour l’aider. Il y a quand même des gens qui ont de vraies pathologies, à qui je dis parfois : “je ne suis pas psy, je ne peux pas vous aider”. Evidemment je ne le leur dit pas comme ça, parce qu’elles ne sont parfois pas prêtes à l’entendre, mais je le leur fait comprendre.  A l’entretien d’accueil je vois ce qui se passe, ce qui ne va pas. Je fais beaucoup parler la personne, lui pose des questions. J’ai plusieurs types de questionnaires tout près, et je sors celui qui correspond le mieux au client. A la fin de cette séance je fais un feedback, c’est-à-dire un compte-rendu de ce que j’ai compris. Je dis mon impression : “Chez vous c’est ça qui ne va pas, pour traiter ça je ferais plutôt ça et ça”. Ensuite je lui renvoie quelque chose qui permet au client d’analyser où il en est, pour qu’il puisse être avec moi dans le travail.
-  Comment se fait le travail ?
-  Le travail se fait à deux, le coaché et moi-même. A 80% des cas je fais un bilan au bout d’une heure et demi pour la vie privée, et deux heures et demi pour la vie privée et professionnelle. Pour ça j’ai des tests, des questions, etc. Chez un psy ça peut durer des années pour avoir un bilan. Moi, en une séance, je vais dire au client ce que j’ai compris de son problème, et ce qu’il peut faire pour le régler. Comme ça le client voit comment moi je le vois, et se dit soit “Ce n’est pas ça du tout”, soit « Je sais ce qui ne va pas et comment aller mieux, je vais aller voir un psy maintenant”, soit il règle tout ça avec moi, car j’ai des méthodes un peu particulières.
-  Combien de temps dure un coaching ?
-   Le coaching c’est plus court que chez un psy, ça a un début et une fin. En général, je propose des abonnements par dix séances, et le client va payer en 3-4 fois. Au bout des dix séances, on voit ce qu’on a fait, où on en est, ce qu’on a réglé, et on voit si on continue ou pas. Un travail moyen c’est une trentaine de séances.
-  Et combien de temps dure une séance ?
-  Une séance de coaching de vie dure trois quarts d'heure, une de coaching mixte vie privée/carrière c’est une heure. Les chefs d’entreprise c’est deux heures la plupart du temps. Ils viennent chaque semaine deux heures, même si ils n’ont pas de problèmes, parce que ça fait du bien de parler.
-  Comment vous êtes-vous fait connaître ?
-  En début de carrière, pour avoir des clients j’ai organisé des conférences. La première fois que j’ai déposé une documentation sur moi, je n’ai eu aucun appel pendant deux mois. J’ai alors fait des réunions où les gens ne payaient que de petites sommes, ainsi que des conférences gratuites. Quand les gens me voyaient, ils voyaient qui j’étais et avaient envie de travailler avec moi ou de m’envoyer du monde. C’est comme ça que j’ai pu me faire connaître. Les cartes de visite ce n’est qu’un support. Il faut environ trois ans pour avoir une clientèle qui permet de vivre de son travail.
-  Nous vous avons repérée grâce à votre site internet. Est-ce-que beaucoup de clients vous découvrent par ce biais ?
-  Oui, j’ai quand même du monde qui vient par mon site internet, même si il est ancien et qu’il faudrait que je le rénove. Il y a des personnes qui me contactent depuis le Haut-Rhin pour me voir. J’ai déjà beaucoup de travail à Strasbourg. 
-  Depuis que vous êtes installée, remarquez-vous des changements dans votre clientèle, comme la raison pour laquelle ils viennent ?
-  Oui. Il y a des moments où il y a des tendances plus définies. Par exemple, il y deux ans on m’appelait plus pour de la dépression qu'aujourd'hui. La clientèle évolue. Maintenant j’ai de plus en plus d’hommes parmi elle. Les hommes qui sont cadres supérieurs aujourd’hui vont de plus en plus aller voir un coach si ils veulent changer de carrière, ont un problème avec leur divorce, veulent prendre la parole en public, etc. J’ai l’impression que c’est quelque chose qui est devenu logique.
-  Quels sont les avantages du coaching ?
-  Pour certains problèmes un psy ne sert à rien. Le coaching c’est un mélange de méthode et d'humain. Pour certains clients qui sont chefs d’entreprise, c’est agréable de pouvoir discuter avec quelqu’un qui connaît bien le monde de l’entreprise, ses rouages et difficultés, et en même temps qui connaît bien l’humain et qui peut aider à un niveau personnel. Un psy ne connaît en général rien à l’entreprise. Et si le chef d’entreprise va voir un consultant en management qui connaît le monde de l’entreprise, celui ci ne connaîtra rien au niveau humain.
-  De quoi parlez-vous avec un chef d’entreprise ?
-  Je peux parler de boulot, de stratégie professionnelle, de lui, de son stress et de son organisation, mais je peux aussi parler des boutons d'acné de sa petite dernière, de ses relations avec sa femme, et puis peut-être avec une secrétaire qui lui plaît bien. Je peux parler de tout, et c’est confidentiel. Je le dis tout de suite au client : “tout ce que vous dites ne sort pas d’ici”.
-  Pensez-vous que le coaching est un effet de mode ?
-  Bien sûr. On parle beaucoup de coaching, mais je ne vois pas beaucoup de coachs compétents. 
-  Recevez-vous plusieurs personnes à la fois ?
-  Oui, lors de coaching de couple. Je vois la femme et l’homme séparément, puis les deux ensemble, ce que ne fait pas un psy, car lui voit l’un ou l’autre. Ou alors il fait une psychothérapie de couple. Mais la plupart des psys estiment que quand ils voient l’un, ils ne sont plus assez neutres pour voir l’autre. Personnellement, je ne fais pas tellement un travail en profondeur comme eux au point de vue psychologique.
-  Quels sont vos tarifs ?
-  J’ai des tarifs officiels, mais je les adapte en fonction du client. Par exemple j’ai des tarifs étudiants moins chers. Officiellement la séance de trois quarts d’heure de coaching de vie est à 60 Euros. Si c’est trop cher, les gens ne vont pas venir assez longtemps pour finir le travail.
-  Merci beaucoup d’avoir répondu à toutes nos questions.